La société civile au cœur du sommet du Partenariat pour un gouvernement ouvert
Membres d’associations citoyennes, acteurs de la civic tech, journalistes… la diversité de la société civile était bien représentée au Sommet mondial du Partenariat pour un gouvernement ouvert. Ils ont témoigné de leurs actions terrain, de leurs victoires, mais également de leurs attentes et interrogations.
Dans le grand hall du Palais d’Iéna régnait début décembre une effervescence inhabituelle. Plusieurs milliers de visiteurs s’y sont réunis à l’occasion du Sommet mondial du Partenariat pour un gouvernement ouvert (PGO). Des espaces de démonstration, de travail et d’échanges (un hackathon nocturne s’est tenu le jeudi) ont été aménagés ainsi qu’un studio multimédia.
Le QG médias des citoyens a organisé une série de débats et de rencontres en marge des conférences et ateliers du programme officiel, qui se déroulaient dans les salles attenantes. Au micro se sont succédés des membres de collectifs citoyens, des acteurs de la civic tech, des chercheurs, des politiques, des blogueurs et des journalistes. Ils ont débattu des grands thèmes du moment, n’hésitant pas à s’emparer de questions sensibles.
Le rôle incontournable des associations citoyennes pour agir en faveur du renouveau démocratique
Cette initiative commune à trois associations françaises, Démocratie ouverte, Place to B et Voxe.org, est révélatrice du rôle croissant qu’est appelée à jouer la société civile. C’est une volonté affichée du PGO, qui en fait une de ses priorités pour les prochaines années. Les associations citoyennes sont incontournables pour mobiliser le grand public et l’associer de manière plus étroite à la démocratie ouverte.
Ces associations sont elles-mêmes confrontées à la nécessité d’inclure de nouveaux publics et de s’élargir à des territoires plus divers que les seuls milieux urbains. Plusieurs pistes ont été évoquées pour élargir leur audience : identifier des porte-voix, intéresser les médias traditionnels par ricochet en faisant le buzz sur les réseaux sociaux, mais aussi vulgariser des concepts encore mal compris du plus grand nombre, valoriser les petites victoires obtenues et unir leurs forces de frappe pour mener des actions d’envergure.
Les civic tech outillent les associations et communautés
Le sommet a été l’occasion de démontrer que la mobilisation citoyenne, appuyée par les outils numériques, parvient à influencer les politiques publiques. L’activiste Janis Thompson a raconté comment les habitants de Chicago, organisés en communautés, ont pu contrecarrer les arguments de la mairie en se servant de données publiques qu’ils ont eux-mêmes complétés. S’ils n’ont pas obtenu gain de cause dans leur lutte contre la fermeture de 129 écoles publiques, seule une poignée y a échappé, ils ont néanmoins réussi à sensibiliser la population et à interpeller la mairie.
En revanche, l’initiative « My building doesn’t recycle » a débouché sur une loi qui oblige les immeubles comptant au moins cinq appartements à mettre en place des services de recyclage. Les outils numériques proposés par les civc tech outillent les communautés et permettent de toucher des profils nouveaux, qui ne se rendent pas forcément aux réunions publiques.
Utopies numériques
Entre numérique et démocratie, c’est une longue histoire dont les civic tech constituent le dernier prolongement. David Prothais, de la start up Eclectic Experience, la retrace en trois grandes étapes.
- Avec la cybernétique, dans les années 50, est apparu le rêve de machines à gouverner. Cette vision fonctionnaliste et rationaliste avait omis un paramètre essentiel : la politique est avant tout une affaire de choix faits par des hommes.
- Vingt ans plus tard, des réseaux de télévision locale aux Etats-Unis retransmettaient des séances de conseils municipaux permettant de s’affranchir des contraintes spatio-temporelles. Le mouvement s’est essoufflé.
- L’avènement d’Internet dans les années 90 a fait naître le concept de cyber démocratie, une forme d’horizontalité et de gouvernance partagée. Aujourd’hui, de nouveaux équilibres sont à définir afin de garantir cette gouvernance distribuée et d’ouvrir Internet à tous les acteurs.
Le quatrième pouvoir œuvre pour la démocratie
La presse et les médias n’échappent au mouvement de défiance qui touche les institutions et les responsables politiques. A l’occasion du sommet, le quatrième pouvoir a démontré comment il pouvait, en s’emparant d’outils numériques et en collaborant à l’échelle internationale, améliorer le fonctionnement de la démocratie dans un monde globalisé en révélant des cas de fraude fiscale. La fuite de 11 millions de documents issus d’un cabinet d’avocats panaméen (« Panama Papers ») a été l’occasion d’une collaboration fructueuse entre journalistes d’investigation. L’ICIJ (International Consortium for Investigate Journalism) a mis à leur disposition les documents, une plate-forme d’échange et des outils pour fouiller les textes afin d’identifier des relations entre des sociétés et des personnes. Après la publication d’articles en avril dernier dans le monde entier, quelque 6 000 personnes font aujourd’hui l’objet d’enquêtes ou de poursuites. Une première victoire. « Il faudra du temps pour changer les législations et intenter des procès », ajoute Cécile Schilis-Galego d’ICIJ.
CFI promeut une culture de l’open data
W Dans le cadre du programme Open data médias, l’agence de coopération médias du ministère des Affaires étrangères et du développement international CFI a convié 50 journalistes et acteurs de la société civile de quinze pays d’Afrique, du Moyen-Orient et d’Asie du Sud-Est, à participer au sommet du PGO. Lors d’ateliers de préparation, ils avaient été préalablement formés à la collecte et la réutilisation des données ouvertes. Durant le Sommet, ils ont pu approfondir leurs échanges et développer des outils afin de pousser leurs pays à adhérer au Partenariat pour un gouvernement ouvert et accélérer les réformes en la matière.
Voir la restitution de CFI lors de la cérémonie de clôture